Entrée au Panthéon de Manouchian: Le Pen ira à la cérémonie malgré les réserves de Macron

Marine Le Pen le 25 janvier 2024 à Paris

By Paul AUBRIAT

Paris (AFP) - Il faudra compter avec elle: Marine Le Pen a fait savoir lundi qu'elle participerait à la cérémonie d'entrée au Panthéon de Missak Manouchian, malgré les réserves d'Emmanuel Macron qui avait estimé que "les forces d'extrême droite seraient inspirées de ne pas être présentes".

La présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale, invitée ès qualité à l'hommage prévu mercredi, a saisi l'occasion pour dénoncer, via son entourage, "les propos outrageants du président de la République", lequel avait estimé dimanche dans L'Humanité que l'absence du RN à la cérémonie s'imposait "compte tenu de la nature du combat de Manouchian".

Le président du parti d'extrême droite, Jordan Bardella, a été plus prolixe: "Le président de la République n'a pas à trier qui sont selon lui les bons et les mauvais élus de la République française", a-t-il fustigé en marge d'un déplacement dans les Alpes-Maritimes, disant penser "que beaucoup de Français sont fatigués de ces leçons de morale".

"A chaque fois que la République nous convoque, nous répondons à son appel", a ajouté la tête de liste du RN pour les élections européennes. Marine Le Pen avait pourtant renoncé la semaine dernière à se rendre à l'hommage national rendu à Robert Badinter, où elle était dûment invitée, protocole oblige, mais dont la présence n'était pas souhaitée par la famille.

Dans son entretien au quotidien communiste, le chef de l'État avait d'ailleurs comparé les deux cérémonies pour justifier ses réserves, convoquant "l'esprit de décence" et estimant que "le rapport à l'histoire devraient conduire (les responsables RN) à faire un choix".

"Nous sommes parfaitement irréprochables ce qui n'est peut-être pas le cas de tous les mouvements politiques dans l'histoire", lui a encore répondu M. Bardella, dont le parti avait quelques heures plus tôt qualifié l'oukase présidentielle de "lourde faute politique" et "faute morale impardonnable", dans un message publié sur X.

\- Les "ascendants" de Le Pen -

Le maire RN de Perpignan, Louis Aliot, avait déjà considéré lundi que son parti avait sa place à la cérémonie d'entrée au Panthéon du militant communiste, en estimant n'avoir "aucune raison de battre en retraite sur ces sujets-là".

"La panthéonisation révèle le caractère sacré, finalement républicain, du personnage, et (elle) s'adresse à tous les Français, quelles que soient leur origine, leur condition ou leurs opinions", avait-il ajouté.

Une version contestée par le sénateur communiste Pierre Ouzoulias qui rappelle que "depuis l'annonce officielle de la panthéonisation", en juin, "Marine Le Pen n'a pas prononcé un mot à ce sujet" et que "le RN a dénoncé l'électoralisme d'Emmanuel Macron".

"Ils sont les héritiers de Vichy et d'une vision ethnique de la nation. Nous sommes les héritiers de Manouchian et d'une vision politique de la nation", a-t-il complété sur X.

Missak Manouchian doit entrer au Panthéon mercredi, un "acte de reconnaissance" de la résistance communiste et étrangère à l'occupant nazi, dont aucune figure n'avait eu droit jusqu'alors à cet honneur, contrairement à la résistance gaulliste, avec la panthéonisation dès 1964 de Jean Moulin.

L'ouvrier et poète sera accompagné de son épouse, Mélinée, également résistante, avec laquelle il reste ainsi uni dans la mort même si elle n'est pas elle-même panthéonisée.

Au même moment, 22 membres du groupe Manouchian, fusillés pour la plupart comme lui le 21 février 1944 dans la clairière du Mont-Valérien, ainsi que leur chef de réseau Joseph Epstein y entreront de façon symbolique, sous la forme d'une plaque portant leur nom.

Le secrétaire national du Parti communiste, Fabien Roussel, s'est lui aussi dit favorable à ce que les membres du RN renoncent à leur participation à la cérémonie. Il a renvoyé Marine Le Pen à "ses ascendants" qui, "dans l'histoire", ont selon lui "contribué à ce (que) soient fusillés" ceux à qui la République doit rendre hommage.

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