Venezuela: Maduro va dire "oui" à son parti pour un troisième mandat

Le président vénézuélien Nicolas Maduro s'exprime lors d'un point de presse au palais présidentiel de Miraflores à Caracas, le 12 juin 2023

By Javier TOVAR avec Laurent ABADIE à Bogota

Caracas (AFP) - Le président du Venezuela Nicolas Maduro, élu depuis 2013 mais dont la légitimité de la réélection en 2018 est contestée par plus de 60 pays, devrait samedi officiellement devenir candidat à un troisième mandat lors de la présidentielle du 28 juillet.

Il doit accepter l'investiture officielle de son Parti socialiste unifié (PSUV), dont il est président, réuni lors d'un congrès. Ce qui n'est qu'une formalité.

Lundi, Diosdado Cabello, vice-président du PSUV et considéré comme le numéro 2 du pouvoir même s'il n'est pas membre de l'exécutif, avait annoncé que "la base" avait désigné le président sortant, sans aucun opposant face à lui, affirmant que "4.240.032 personnes ont participé" au processus.

Nicolas Maduro, 61 ans, se dit l'héritier du "chavisme", la doctrine de son prédécesseur Hugo Chavez (1999-2013) pour un "socialisme du XXIe siècle" basé sur des nationalisations, une forte présence de l'Etat et de l'appareil militaire.

Mais Maduro ne bénéficie pas de l'aura de Chavez. Sa présidence a été marquée par de multiples sanctions internationales pour tenter de le déloger du pouvoir, un large effondrement de l'économie en dix ans dans un pays doté des réserves de pétrole parmi les plus grandes au monde, l'exil de plus de sept millions de vénézuéliens fuyant la faim et la pauvreté, et des allégations de violations des droits humains.

Sa popularité affaiblie malgré une omniprésence à la télévision d'Etat, il a su se maintenir au pouvoir avec le soutien de l'armée, de Cuba, de la Russie et de la Chine.

Sa mainmise sur les institutions lui a permis de neutraliser détracteurs et opposants, comme Juan Guaido, considéré comme président "par intérim" par de nombreux pays, dont les Etats-Unis et ceux de l'UE après les élections "illégitimes" de 2018, boycottées par l'opposition. Il est désormais exilé aux Etats-Unis.

Henrique Capriles, deux fois ancien candidat à la présidence, et Maria Corina Machado, qui avait remporté haut la main les primaires de l'opposition en octobre, ont été déclarés inéligibles à ce scrutin par une justice accusée d'être aux mains du pouvoir "chaviste", pour des accusations qu'ils contestent.

La légitimité de cette élection est une nouvelle fois en question.

\- "Jusqu'au bout" -

Pourtant, le poids des sanctions américaines sur le pétrole vénézuélien a pu un temps faire espérer des élections "transparentes", auxquelles appelait l'opposition.

Un accord signé à La Barbade en octobre prévoyait la présence d'observateurs internationaux et la possibilité des candidats de l'opposition déclarés inéligibles de pouvoir contester la décision de justice.

Las, la Cour suprême a confirmé en janvier les 15 ans d'inéligibilité infligées à M. Capriles et Mme Machado.

Les États-Unis, qui ont allégé leurs sanctions suivant l'accord de La Barbade, ont menacé de ne pas renouveler une licence autorisant l'achat de pétrole et de gaz lorsqu'elle arrivera à échéance en avril "en l'absence de progrès (...) notamment pour permettre à tous les candidats de concourir à l'élection présidentielle".

Pour la Norvège, médiateur entre opposition et gouvernement, il est "fondamental" que s'applique l'accord de La Barbade.

Mais le temps joue en faveur de Maduro.

En fixant au début du mois les élections au 28 juillet, date de naissance de Chavez, le Conseil national électoral (CNE) ne laisse que peu de temps pour les recours. La clôture officielle des inscriptions pour les candidats a été fixée au 25 mars.

Et vendredi, Luis Ratti, un responsable politique vénézuelien, accusé d'être un sous-marin du pouvoir, a demandé à la Cour suprême de mettre son veto à la participation de la principale coalition d'opposition à l'élection.

Mme Machado veut croire en l'élan populaire qui semble l'accompagner dans chacun de ses déplacements à travers le territoire.

"Nous sommes plus forts que jamais", "nous irons jusqu'au bout", "on ne peut pas arrêter ce mouvement", a-t-elle affirmé devant des partisans mercredi à Mariara, à 140 km à l'ouest de Caracas. "L'issue n'est pas seulement l'éviction d'une tyrannie brutale, cruelle, corrompue, maléfique, mais c'est la construction d'un Venezuela de respect, de liberté", a-t-elle souligné.

Mais empêchée de se présenter, elle pourrait nommer un remplaçant, favorisant les desseins du pouvoir chaviste qui a souvent usé du stratagème de l'inéligibilité pour écarter des rivaux, tant au niveau national que local.

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