Birmanie: jour de parade militaire pour la junte

Naypyidaw (Birmanie) (AFP) - La junte birmane, affaiblie après une série de revers face à ses opposants, exhibe ses forces mercredi avec un défilé marquant le jour national des forces armées, sur fond d'accusations renouvelées d'atrocités.

La parade a débuté en fin d'après-midi dans la capitale Naypyidaw, ville nouvelle créée ex nihilo par l'armée au milieu de la jungle, selon des images diffusées par la chaîne d'Etat MRTV.

Le direct a montré des centaines de soldats marchant au pas avec drapeaux et armes, devant des civils en habit traditionnel.

Les derniers développements du conflit civil qui s'est intensifié après le coup d'Etat de 2021, ont placé la junte dans une position de faiblesse face à ses opposants ethniques et politiques.

L'offensive coordonnée de trois groupes ethniques minoritaires près de la frontière chinoise, fin octobre, a marqué un tournant majeur en faveur des adversaires du pouvoir, qui ont pris le contrôle de certaines villes et routes stratégiques, ont noté les observateurs.

Les pertes massives, couplées aux défections et aux difficultés de recrutement, font que l'armée "est menacée dans son existence", a assuré récemment Tom Andrews, le rapporteur spécial de l'ONU en charge des droits humains en Birmanie.

Mais, malgré des signes de "désespoir", la junte reste "extrêmement dangereuse", avait-il rappelé plus tôt, en février.

Les autorités ont indiqué en février vouloir imposer un service militaire d'au moins deux ans aux hommes de 18 à 35 ans et femmes de 18 à 27 ans. Cette annonce a pris de court des milliers de jeunes Birmans, qui cherchent désormais à fuir le pays.

Une issue au conflit semble lointaine pour le moment, d'autant que le chef de la junte Min Aung Hlaing a admis cette semaine que les élections promises depuis le putsch pourraient ne pas couvrir la totalité du territoire en raison de l'instabilité en cours.

\- Dîner de gala -

L'armée, qui a justifié sa prise de pouvoir par des accusations, non-étayées, de fraudes massives lors du vote de 2020 remporté par le parti pro-démocratie d'Aung San Suu Kyi, assure vouloir organiser un nouveau scrutin "libre et juste", mais sans préciser de calendrier.

La reconduction de l'état d'urgence, devenue automatique face à la résurgence de ses adversaires, repousse sans cesse l'échéance, auquel ne participera pas le mouvement, dissous depuis, de la prix Nobel de la paix, aujourd'hui en prison.

Le régime a été accusé à plusieurs reprises de brûler des villages, procéder à des exécutions sommaires ou recourir aux bombardements aériens et aux frappes d'artillerie pour punir les communautés refusant son pouvoir, par des groupes de droits humains et d'opposants.

"Au moins 20 personnes ont été tuées par des frappes aériennes de l'armée rien que durant ce mois (...) Pendant que le régime militaire organise des parades dans les rues de Naypyidaw, le peuple de Birmanie continue de souffrir de la persistance des combats dans le pays", a déclaré la ministre d'Etat britannique à l'Indo-Pacfique, Anne-Marie Trevelyan, citée dans un communiqué mercredi.

Presque un tiers de la population, soit plus de 18 millions de personnes, requiert une aide humanitaire, d'après les Nations unies.

Lors du défilé de 2023, Min Aung Hlaing, entouré de chars et de lance-missiles, avait promis, devant environ 8.000 militaires, "des mesures décisives" pour "combattre pour de bon" les opposants de l'armée.

Cette année, les festivités, qui commémorent le début de la résistance de l'armée birmane à l'occupation japonaise en 1945, ont été lancées mardi par un dîner de gala auquel ont assisté des représentants de Moscou, allié de Naypyidaw, a rapporté un média d'Etat birman.

Le conflit en Birmanie a tué plus de 4.700 personnes depuis le coup d'Etat, selon un groupe local de surveillance.

© Agence France-Presse