Les nombreux visages de l'extrême droite en Europe

Giorgia Meloni et Viktor Orbán sont les seuls chefs de gouvernement de partis de droite radicale dans l'UE ©Geert Vanden Wijngaert/Copyright 2023 The AP. All rights reserved.

Les partis d’extrême droite progressent en Europe. Additionnées les unes aux autres, ces formations pourraient former le deuxième groupe politique au sein du prochain Parlement européen.

Les populistes sont actuellement divisés en deux groupes dans l’hémicycle :

Une augmentation du nombre de sièges est attendue pour les deux groupes : 76 pour CRE, 81 pour ID, selon un sondage Euronews/Ipsos.

Unis contre les migrants, divisés sur la guerre

Selon les experts, il existe des points communs entre les deux familles politiques.

"Le premier élément est sans aucun doute l'aversion pour l'immigration", explique Lorenzo Castellani, professeur d'histoire des institutions politiques à l'université Luiss Guido Carli de Rome. "L'autre élément est l'euroscepticisme, dans le sens où tout le monde est contre une plus grande intégration dans l'Union européenne. Le troisième est l'idée de représenter les gens ordinaires contre l'establishment libéral progressiste et contre les partis traditionnels".

Les membres de CRE et ID dénoncent aussi les politiques environnementales, jugées trop néfastes pour l'économie et le tissu industriel des pays membres. Les deux groupes ont ainsi voté contre presque toutes les mesures du paquet Fit for 55, le plan de l’UE qui entend réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030.

La division la plus profonde des populistes concerne la politique étrangère, et en particulier la guerre en Ukraine.

"Les membres de CRE soutiennent l'Ukraine et s'opposent à toute concession à la Russie. En revanche, les membres d'Identité et Démocratie s'opposent à toute tentative de soutien à l'Ukraine au cours de l'année à venir et seraient ravis d'entamer des négociations de paix avec Vladimir Poutine", explique Lorenzo Castellani.

Cette différence a même incité le parti des Vrais Finlandais à passer d'Identité et Démocratie aux Conservateurs et Réformistes européens.

Même au sein de ID, les positions sur le conflit russo-ukrainien sont différentes : de la ferme condamnation de l'invasion par le Rassemblement national français, à ceux qui, comme le candidat principal de l'Alternative für Deutschland, Maximilian Krah, affirment que l'Ukraine devrait céder ses territoires orientaux et ne considèrent pas son entrée dans l'UE comme possible.

L'influence de l'extrême droite dans le prochain Parlement

L'euroscepticisme des partis ID et CRE présente également des nuances plus ou moins prononcées. En général, les premiers sont plus radicaux et extrémistes, les seconds plus "constructifs", explique Dave Sinardet, professeur de sciences politiques à la Vrije Universiteit de Bruxelles.

Cette tendance se reflète également en Italie, où Fratelli d'Italia semble avoir adopté une position plus modérée à l'égard de l'UE et où la Lega maintient des positions plus dures, à commencer par le slogan de Matteo Salvini pour les prochaines élections : "Plus d'Italie, moins d'Europe".

Selon Dave Sinardet, la différence de positionnement est probablement due au fait que les partis écologistes sont plus souvent en charge ou impliqués dans des majorités gouvernementales.

Cela signifie également que des partis comme Fratelli d'Italia pourraient soutenir la Commission européenne à l'avenir, soit en faisant partie de la majorité du prochain Parlement européen, soit simplement en soutenant une personnalité du Parti populaire européen (PPE) pour la présidence de la Commission européenne.

La montée de l’extrême droite aura de facto une influence sur les politiques de l'UE, menaçant, par exemple, la réalisation du Pacte vert quoi doit mener l’UE vers la neutralité carbone en 2050.

Même si une unification des deux groupes semble aujourd'hui très difficile, une coopération renforcée pourrait être envisagée entre les partis populistes, selon Lorenzo Castellani.

Ils pourraient tenter d'exercer une influence sur les chrétiens-démocrates. Ensemble, le PPE, CRE et ID disposeraient, selon les projections, d'une sorte de droit de veto. Ces trois groupes, de la droite modérée à l’extrême droite pourraient s’entendre pour bloquer des textes.

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