Maximilian Krah se retire de la direction de l'AfD sous la pression de ses partenaires européens de l'extrême droite

Maximilian Krah, du parti d'extrême droite "Alternative pour l'Allemagne", lors d'une session au Parlement européen à Strasbourg, France, le 23 avril 2024 ©AP Photo/Jean-Francois Badias

Maximilian Krah, tête de liste aux élections européennes pour le parti d’extrême Alternative für Deutschland (AfD) démissionne du bureau exécutif fédéral de sa formation. Cette décision fait suite aux pressions exercées par le Rassemblement national (RN) français, la Lega italienne et le Parti populaire danois (DF), ses partenaires au sein du groupe Identité et Démocratie(ID) au Parlement européen.

"Je reconnais que mes déclarations factuelles et nuancées sont utilisées à mauvais escient comme prétexte pour nuire à notre parti", écrit Maximilian Krah dans une déclaration publiée sur X.

"_La dernière chose dont nous avons besoin en ce moment, c'est d'un débat sur moi. L'AfD doit préserver son unité. C'est pourquoi je m'abstiendrai de toute nouvelle apparition lors de la campagne électorale avec effet immédiat et je démissionnerai de mon poste de membre du comité exécutif fédéra_l", ajoute-t-il.

Cette démission intervient après ses propos au cours du week-end dans des médias italiens où il estimait que les personnes ayant porté l'uniforme du nazi des SS pendant la Seconde Guerre mondiale n'étaient pas "automatiquement des criminels".

"Il faut évaluer la culpabilité au cas par cas. À la fin de la guerre, il y avait près d'un million de SS. Même (le lauréat du prix Nobel) Günter Grass était membre de la Waffen-SS", a-t-il expliqué.

Les listes électorales ne pouvant plus être modifiées en Allemagne, Maximilian Krah est toujours en lice pour être réélu en tant que membre de l'AfD au Parlement européen.

Se débarrasser de Krah

Dans une action coordonnée mardi, plusieurs alliés de l'AfD au sein d’Identité et Démocratie ont annoncé qu'ils mettaient fin à leur alliance avec le parti allemand à cause de ces commentaires.

Anders Vistisen, tête de liste du parti d'extrême droite danois DF, qui représente également le groupe dans les débats préélectoraux, a écrit sur X mardi soir que "Maximilian Krah de l'AfD a montré par ses déclarations et ses actions qu'il n'avait pas sa place au sein du groupe ID".

"Si l'AfD ne profite pas de la situation et ne se débarrasse pas de M. Krah, la position du DF est que l'AfD doit quitter le groupe ID", a-t-il ajouté.

En France, Jordan Bardella, tête de liste du RN, a confirmé lors d'un débat télévisé mardi soir que son parti ne siégerait plus avec l'AfD après les élections du 6 au 9 juin.

"Je pense que l'AfD, avec laquelle nous avons eu l'occasion de travailler au Parlement européen ces cinq dernières années, a franchi des lignes que je considère comme des lignes rouges et, par conséquent, le Rassemblement national aura de nouveaux alliés à l'issue des élections européennes, mais ne siégera plus aux côtés de l'AfD", a-t-il précisé sur LCI.

Une source au sein du parti italien Lega a déclaré dans un communiqué mardi soir que "comme toujours, Matteo Salvini et (le RN de) Marine Le Pen sont parfaitement alignés et en accord", suggérant que Lega soutiendrait le RN et DF dans l'éviction de l'AfD du groupe.

Une série de scandales

Les commentaires du week-end ne sont pas le seul scandale qui entache la campagne de l'AfD et de Maximilian Krah pour les élections européennes.

L'assistant de l’eurodéputé d’extrême droite, Jian Guo, a été arrêté le mois dernier en Allemagne, accusé d'être "un employé des services secrets chinois" et d'avoir "transmis à plusieurs reprises des informations sur les négociations et les décisions du Parlement européen à son client des services de renseignement".

Jian Guo est également accusé d'avoir espionné des dissidents chinois vivant en Allemagne.

Les bureaux du parlementaire et de son assistant ont été perquisitionnés par la police au début du mois, mais l'eurodéputé a refusé de quitter la direction de l'AfD à la suite de ce scandale, surnommé "Chinagate".

Petr Bystron, deuxième sur la liste de l'AfD, a été accusé le mois dernier d'avoir accepté plus de 20 000 euros en espèces pour une opération d'influence soutenue par Moscou afin de "promouvoir" la propagande russe dans l'Union européenne.

Le parti a par ailleurs provoqué des manifestations de masse dans toute l'Allemagne en janvier après les révélations du site web d'investigation Correctiv selon lequel plusieurs hauts responsables de l'AfD avaient tenu une réunion secrète pour discuter de la "remigration", c'est-à-dire de l'expulsion forcée de tous les étrangers et des citoyens allemands appartenant à une minorité ethnique.

Ces scandales nuisent à l'AfD dans les sondages. Bien qu'elle reste en deuxième position derrière l'Union chrétienne-démocrate (CDU), sa part de voix a diminué, tandis que celle du parti du chancelier Olaf Scholz, le SPD, a réduit l'écart.

Plus de clivage politique entre ID et CRE

Le groupe ID devrait être l'un des principaux gagnants des prochaines élections européennes et devrait, avec l'AfD dans son giron, augmenter son nombre de sièges de 59 à 82, selon le centre de sondages d'Euronews. Le retrait de l'AfD du groupe diminuerait cette percée annoncée par les enquêtes d'opinion.

Le groupe eurosceptique de droite radicale et d’extrême droite, des Conservateurs et Réformistes européens (CRE), qui compte d'anciens partis de l'ID parmi ses membres, devrait également passer de 68 à 75 sièges.

Anders Vistisen a suggéré dans une interview accordée à Euronews en début de semaine que CRE et ID pourraient chercher à aplanir leurs différences afin de renforcer leur influence.

"Ce qui ne va pas, à mon avis, c'est qu'il y a deux groupes à droite, et je pense que cela a plus à voir avec de grandes personnalités dans certains des plus grands partis qu'avec des différences politiques", a-t-il précisé dans le programme Global Conversation.

"Il n'y a pas plus de clivages politiques entre ID et CRE qu'il n'y en a au sein du PPE, du S&D ou du parti Renew, par exemple", a-t-il ajouté.

© Euronews