Manches retroussées, Attal en campagne malgré tout

Le Premier ministre Gabriel Attal (2e g) et le candidat Renaissance Jean-Pierre Pont (3e g) pour les législatives, le 13 juin 2024 à Boulogne-sur-Mer, dans le Pas-de-Calais

By Anne RENAUT

Boulogne-sur-Mer (AFP) - Finie la "sidération", place à "l'action". Gabriel Attal est reparti en campagne jeudi dans le Pas-de-Calais pour défendre le bloc "central" de la majorité face aux "deux extrêmes", malgré son désaccord avec la dissolution qui pourrait conduire Jordan Bardella à Matignon.

"Bon courage, parce que ça va pas être facile", lance une femme au Premier ministre après avoir fait un selfie avec lui à Boulogne-sur-Mer, un département devenu un fief de l'extrême droite, qui a gagné haut la main les élections européennes le 9 juin et est donnée favorite aux législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet.

"C'est par définition difficile. On est dans un moment difficile, il faut aller convaincre les Français, mais moi je ne suis pas du genre à baisser les bras", assure Gabriel Attal, les manches de sa chemise retroussées.

Il est venu soutenir le candidat Renaissance Jean-Pierre Pont, élu de justesse député en 2022 face au Rassemblement national et à une gauche divisée.

Le député sortant raconte avoir connu deux dissolutions de l'Assemblée nationale. "Vous allez me raconter parce qu'en 1997 (date de la dernière dissolution, ndlr), j'avais 8 ans", lui dit le chef de gouvernement, venu partager un déjeuner en terrasse avec élus et militants.

Gabriel Attal a été informé tardivement de la dissolution et a même tenté, en vain, de dissuader le président en proposant sa démission.

\- "Histoires d'appareils" -

A ses côtés, l'ancienne ministre Brigitte Bourguignon, battue par le RN en 2022, repart aussi en campagne.

"On a 17 jours et deux week-ends. C'est très important qu'on soit sur le terrain et pas dans des histoires d'appareils", assure Gabriel Attal au nom d'une majorité "diverse et unie" pendant que la droite se déchire après l'appel d'Eric Ciotti à s'allier avec le RN et la gauche est toujours en tractations sur les investitures.

"On ne veut pas que l'extrême droite et l'extrême gauche gouvernent le pays" répète le locataire de Matignon, menacé de devoir quitter son poste le 8 juillet.

Il dénonce longuement l'"accord de la honte" entre le Parti socialiste, la France insoumise et les autres partis de gauche pour la formation d'un nouveau "Front populaire", et promet de "se mobiliser à fond pour que les Français choisissent une voie (...) attachée à une forme d'humanisme, d'éthique politique et de progrès".

"Ca va être dur", lui prédit un retraité, inquiet des projets de loi suspendus au Parlement comme celui sur la fin de vie.

Cette élection "c’est un choix de qui vous voulez au gouvernement: Jordan Bardella, Jean-Luc Mélenchon ou ma pomme", lui répond Gabriel Attal, favorable à un débat entre les trois hommes, une proposition déclinée par le leader insoumis.

\- "Rester en poste" -

Il ne distribue finalement pas le premier tract de campagne de la majorité, imprimé à 500 exemplaires, avec une faute d’orthographe, signe de la précipitation dans laquelle se trouvent les candidats lancés dans une campagne de seulement trois semaines.

Une seule photo y figure, celle du Premier ministre. Gabriel Attal, qui mènera la campagne, avait été pressé par les députés de son camp de mettre son visage sur les tracts au lieu de celui d'Emmanuel Macron, qui génère du rejet sur les marchés.

Trois macronistes déçus, cadres dans la banque, ont, eux, fini par voter Jordan Bardella aux européennes et hésitent pour les législatives. "J’espère que le régalien va se réveiller", dit l’un d’eux, qui dénonce l'insécurité et la manière "rugueuse" dont a été faite la réforme des retraites.

Sollicité par des habitants près d'un restaurant, Gabriel Attal défend, lui, la réforme de l'assurance chômage, très contestée à gauche et qui divise son camp, dont le décret sera bien pris d'ici au 1er juillet, entre les deux tours des législatives anticipées.

Il défend aussi les mesures du gouvernement en faveur des sinistrés des inondations qui ont touché le département, où il a tenu à venir chaque mois depuis sa nomination à Matignon début janvier.

Le Premier ministre finit d'ailleurs sa visite dans la maison de Jean-Michel Rolland, un habitant d'Andres victime des inondations, qui avait fondu en larmes devant lui.

Depuis secouru, M. Rolland ne tarit pas d'éloges sur le chef du gouvernement qui "tient ses promesses". "Et j'espère une chose, c'est que vous allez rester en poste", luit dit-il.

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