Législatives: la France anti-RN dans la rue, tempête à LFI, Attal mise sur le pouvoir d'achat

Manifestation contre l'extrême droite à Strasbourg, le 15 juin 2024 dans le Bas-Rhin

By Pierrick YVON et Victoria LAVELLE avec les bureaux de l'AFP en régions

Paris (AFP) - "La France, on l'aime, pas le R'Haine": plusieurs dizaines de milliers d'opposants à l'extrême droite ont défilé samedi à travers la France, à l'appel de syndicats, d'associations et du Nouveau Front populaire, l'union des partis de gauche ébranlée par des accusations de "purge" au sein de LFI.

En campagne après la "sidération" de la dissolution, Gabriel Attal a dévoilé les premières mesures du programme de la majorité, en cas de victoire du camp présidentiel. Avec un leitmotiv: renforcer le pouvoir d'achat des Français de la classe moyenne.

Sur l'ensemble du territoire, 640.000 personnes ont manifesté sur l'ensemble du territoire, dont 250.000 à Paris, d'après la CGT. Dans la capitale, la préfecture de police a dénombré 75.000 manifestants.

De Bayonne à Nice, de Vannes à Reims, les anti-RN se sont mobilisés contre la perspective d'une victoire du Rassemblement national aux législatives avec à la clef l'hypothèse d'une entrée de son patron, Jordan Bardella, à Matignon.

Les mêmes slogans ont résonné dans les cortèges: "Bardella casse toi, la République n'est pas à toi", "la jeunesse emmerde le Front national", "pas de quartier pour les fachos, pas de fachos dans nos quartiers".

"Nous sommes tous des enfants d'immigrés", a lancé à Marseille Jean Cugier, un professeur d'EPS de 43 ans, venu manifester contre "le repli sur soi que propose l'extrême droite".

"Je suis là pour défendre les droits des femmes, l'égalité entre les peuples, l'écologie aussi", a raconté à Paris, Marie Chandel, 58 ans, employée dans l'Education nationale.

A Marseille, 11.700 personnes ont défilé selon la préfecture, 4.000 personnes à Lille. A Bordeaux, ils étaient 6.800 selon les autorités.

Des chiffres très en deçà de la mobilisation du 1er mai 2002, où plus d'un million de personnes avaient battu le pavé pour dire "non" au Front national après la qualification de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle.

A Marseille, des jeunes, des familles venues avec leurs enfants et des personnes âgées ont manifesté dans une ambiance festive, un drapeau français à la main pour certains.

Les cortèges se sont déroulés très majoritairement dans le calme hormis quelques brefs épisodes de tensions.

A Rennes, quelques dizaines de militants antifascistes ont été repoussés par la police par des gaz lacrymogènes.

A Paris, neuf personnes ont été interpellées à ce stade et trois membres des forces légèrement blessées, selon la préfecture. Quelques dégradations ont été constatées le long du cortège.

De source policière, 21.000 policiers et gendarmes étaient déployés sur tout le territoire.

Cinq syndicats CFDT, CGT, UNSA, FSU et Solidaires avaient appelé à la mobilisation. FO, CFE-CGC et CFTC mettent en avant leur apolitisme pour ne pas appeler à manifester.

-"purge"-

Les leaders de gauche ont défilé en tête du cortège à Paris. Sans un mot sur les profondes divergences qui ébranlent le Nouveau Front populaire, après la décision de La France Insoumise (LFI) de ne pas réinvestir plusieurs figures opposées à Jean-Luc Mélenchon.

"Nous sommes prêts (...) on va vous redonner la flamme. Et pas celle du Front national, celle-là on va l'éteindre", a lancé la patronne des Ecologistes Marine Tondelier.

"Il y a des différences entre nous mais quand l'essentiel est en cause, nous n'avons pas le droit de faire autre chose que de nous rassembler", a renchéri le patron des socialistes, Olivier Faure.

"Nous sommes en train d'écrire l'histoire", a assuré Mathilde Panot, une proche de Jean-Luc Mélenchon.

A Amiens, François Ruffin, a tout de même exhorté à "ne pas revenir aux rancoeurs", mais "à prendre de la hauteur". "Jean-Luc Mélenchon est fabuleux quand il se met en retrait", a-t-il taclé.

La grogne au sein de LFI a éclaté vendredi soir.

Un proche du leader insoumis, Adrien Quatennens, pourtant condamné en 2022 à quatre mois d'emprisonnement avec sursis pour violences conjugales, a été réinvesti dans le Nord.

En revanche, Danielle Simonnet, Raquel Garrido et Alexis Corbière, des figures historiques du mouvement opposées à la ligne mélenchoniste, ont été brutalement écartées et remplacées par d'autres candidats inconnus du grand public.

"Une purge", a dénoncé la première, le deuxième accusant Jean-Luc Mélenchon de "régler ses comptes".

"Les investitures à vie n'existent pas" au sein de LFI, a répliqué le tribun dans 20 minutes. "La cohérence politique et la loyauté dans le premier groupe parlementaire de gauche sont aussi une exigence pour gouverner".

Olivier Faure a assuré vouloir "régler la scandaleuse éviction" des députés LFI, sans précision.

Autre sujet potentiel de zizanie au sein du Nouveau Front populaire, l'ancien président socialiste François Hollande, favorable à l'union de la gauche contre l'extrême droite, a annoncé sa candidature aux législatives en Corrèze.

-Sondages: le RN en tête-

La majorité continue d'occuper le terrain. Son chef de file, Gabriel Attal, a dévoilé dans la presse régionale une série de mesures pour renforcer le pouvoir d'achat.

Il a confirmé, en cas de victoire, une baisse des factures d'électricité de 15% "dès l'hiver prochain", promis une diminution du prix des fournitures scolaires et la mise en place d'une complémentaire santé "publique" à 1 euro par jour pour ceux qui ne sont pas couverts.

Il propose aussi d'augmenter le montant de la prime dite "Macron", versée par les entreprises à leurs salariés jusqu'à 10.000 euros, au lieu de 6.000 actuellement, "sans charge ni impôt".

Avec 33% des intentions de vote, le RN ressort nettement en tête au premier tour des législatives le 30 juin devant le Nouveau Front populaire (25%) et la majorité présidentielle (20%), selon un sondage Opinionway..

Alors que l'Euro de football a démarré vendredi soir en Allemagne, l'attaquant de l'équipe de France Marcus Thuram a appelé à "se battre pour que le RN ne passe pas", une prise de position rare pour un sportif de haut niveau.

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