Ukraine: Zelensky espère une "paix juste aussi vite que possible" au sommet en Suisse

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky lors d'une conférence de presse au sommet sur la paix en Ukraine, le 15 juin 2024 à Burgenstock, près de Lucerne, en Suisse

By Robin MILLARD avec Agnès PEDRERO à Genève

Burgenstock (Suisse) (AFP) - Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a dit son espoir samedi de parvenir à "une paix juste aussi vite que possible", au début du premier sommet sur la paix en Ukraine qui se tient en Suisse, sans la Russie.

"Tout ce qui sera convenu (à ce sommet) fera partie du processus de rétablissement de la paix dont nous avons tous besoin", a déclaré M. Zelensky, ajoutant : "Nous verrons l'Histoire se faire lors de ce sommet".

Quelque 90 pays y participent mais ce sommet affiche des ambitions mesurées en l'absence de la Russie et de la Chine.

"Ensemble, nous faisons le premier pas vers une paix juste", a dit le président ukrainien, ajoutant que "le monde est plus fort" que Vladimir Poutine.

Mais le président russe a de facto fixé vendredi la reddition de l'Ukraine comme condition pour des pourparlers. Des exigences rejetées par Kiev et ses alliés, à l'image samedi de la cheffe du gouvernement italien Giorgia Meloni qui les a qualifiées de "propagande".

"Le fait que Poutine ait présenté hier cette stupide proposition de paix montre qu'il est clairement en train de paniquer", a également affirmé le Premier ministre néerlandais sortant Mark Rutte, lors de son arrivée au Sommet.

L'Ukraine arrive "en position de force" au sommet après la réunion du G7, l'accord de principe des 27 à l'ouverture d'adhésion à l'UE et la décision de l'Otan de piloter directement le soutien militaire à l'Ukraine, a déclaré aux journalistes le président finlandais Alexander Stubb.

"Écrire l'Histoire est probablement un grand mot, mais nous devons commencer à l'écrire", a-t-il dit.

La présidente suisse Viola Amherd, aux côtés de son homologue ukrainien, voit déjà plus loin que ce week-end.

"Nous pouvons préparer le terrain pour des discussions directes entre les parties belligérantes, explique t-elle. "Si nous voulons inspirer un processus de paix, la Russie doit également être impliquée à un moment donné. Cela est clair pour tous", estime t-elle.

Un deuxième sommet est envisagé, auquel Kiev espère qu'une délégation russe participera.

“La prochaine conférence ne devrait absolument pas se dérouler sans la Russie. Nous devons parler à l'ennemi", a lancé la présidente slovène, Natasa Pirc Musar.

Pour avoir un maximum de soutien, les Suisses ont tenté d'inviter le plus grand nombre de pays possibles, non sans difficulté.

Parmi les pays émergents des Brics, seule l'Arabie saoudite envoie son chef de la diplomatie. Le Brésil, l'Inde ou encore l'Afrique du sud ont des envoyés de rang moins élevé.

Pékin n'entend pas envoyer d'émissaire en l'absence de Moscou.

\- Prisonniers et enfants déportés -

La réunion, qui se tient dans la station ultra-chic de Burgenstock, perchée au-dessus du lac des Quatre-Cantons, débutera par une séance plénière samedi en fin d'après-midi, suivie d'un dîner.

La déclaration finale est toujours en discussion. La Suisse a accédé à certaines demandes de M. Zelensky et de ses alliés, selon l'agence suisse Keystone-ATS, citant une source ukrainienne bien informée.

Le terme "agression russe" et "intégrité territoriale" de l'Ukraine seraient ainsi dans la dernière version du projet de déclaration.

Dimanche, trois sujets seront abordés en groupes de travail: sûreté nucléaire, liberté de navigation et sécurité alimentaire, et aspects humanitaires, notamment le sort des enfants ukrainiens déportés en Russie.

Le Premier ministre irlandais Simon Harris a dénoncé ce "vol d'enfants", indiquant s'attendre à ce que leur déportation "s'amplifie à l'approche des mois d'été, lorsque l'on entend des références répugnantes à des programmes de vacances en Russie".

Les Ukrainiens réclament le retour de près de 20.000 mineur "déportés ou déplacés de force" en Russie.

Un des thèmes majeurs est de voir "comment on peut faire revenir les enfants déportés" grâce à l'aide d'autres Etats ou organisations internationales, a déclaré Didier Reynders, commissaire européen pour la Justice.

En Ukraine sur le front oriental de Donetsk, où se déroulent de violents combats, des soldats sont dubitatifs sur ce grand raout diplomatique, tout comme les experts.

A Lucerne, située à quelques kilomètres du Burgenstock, des dizaines de personnes se sont rassemblées, portant des drapeaux ukrainiens, pour réclamer d'avantage d'efforts pour la libération des prisonniers de guerre ukrainiens.

Originaire de Marioupol, Hanna, qui ne veut pas donner son nom car son mari a été capturé il y a deux ans, est venue de Suède : "Je ne peux pas dire que je suis très optimiste, mais je m'attends à des résultats. Il y aura peut-être des processus d'échange pour les prisonniers de guerre", a-t-elle dit à l'AFP.

\- Des milliards et des alliances -

La vice-présidente américaine Kamala Harris, qui représente le président Joe Biden retourné aux Etats-Unis après le G7 en Italie, est venue au sommet avec une aide de plus de 1,5 milliard de dollars, principalement pour le secteur énergétique et pour l'aide humanitaire.

Volodymyr Zelensky, arrivé dès vendredi soir, vient de passer les dernières semaines à plaider sa cause à travers le monde entier et du G7 en Italie avec un prêt de 50 milliards de dollars en poche.

Les fonds seront garantis par les intérêts que rapporteront les actifs russes gelés depuis le début de l'invasion. Pour Vladimir Poutine, c'est "un vol qui ne restera pas impuni".

Le président ukrainien a aussi signé des accords de sécurité avec les Etats-Unis et le Japon en marge du G7, et reçoit de nouveau des armes des Etats-Unis après de longs mois d'attente qui ont mis son armée en grande difficulté.

Enfin vendredi soir, les 27 ont donné leur "accord de principe" à l'ouverture des négociations d'adhésion à l'UE.

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